"On est de son enfance, comme on est d'un pays"

Antoine de Saint-Exupéry

mercredi 11 novembre 2015

AGHENDAR, la Cité Lumière 1





Ville Futuriste
Pierre -André Gervaix

https://www.flickr.com/photos/rdspang/




 AGHENDAR

La Cité Lumière



Golane observait les glisseurs planer puis disparaître sur la ligne argentée de l’horizon. Ces grands oiseaux de métal à l'allure véloce parcouraient l'univers en quête de nouveaux mondes. Il attendait impatient leurs apparitions furtives dans le ciel bleu liquide en restant tapis dans l’ombre de l’Aérospace. Parfois, il lui arrivait de s'endormir à même le sol et se laissait bercer par le sifflement que dégageait la propulsion des moteurs. 
À cet instant, il lui semblait avoir toujours vécu dans la vision furtive de leur envol. Il posa sa tête contre la paroi du mur, il percevait  à travers la matière froide, la présence des faucons de métal. En se concentrant, il  pouvait distinguer nettement le frémissement de leurs ailes glisser sur la brise.
Ce jour-là, dans l'Aérospace, une légère secousse piqua sa curiosité. Il vit pour la première  fois, le glisseur qui vint se placer face à lui comme pour le défier.
Son corps fuselé et métallisé se reflétait sur le béton glacé créant l'illusion d'une fusion totale avec le sol. Ses ailes majestueuses se déplièrent, en quelques secondes. Le glisseur s’élança brusquement dans le ciel  sans émettre un son et se retrouva instantanément sur la ligne de l’horizon. Le temps d'un battement de cils, il se volatilisa dans les vapeurs opaques liquéfiées.  Golane attendit fasciné, espérant le revoir, mais il ne revint pas. 
Un étrange silence régnait dans l’Aérospace avant l'arrivée des premières équipes. Bientôt, le bruit des machines et des hommes envahirait les lieux, le Spacio-Port d’Aghendar accueillait un nombre impressionnant de vaisseaux. C’était une bâtisse située au cœur de la cité pourvue d’étages et de dédales bien organisés où hommes et machines évoluaient en binôme. Son dôme s’ouvrait sur l’espace tel un ventre énorme d’où émergeaient dans un flux régulier de gigantesques bâtiments flottants. Golane affectionnait ces moments de solitude où son esprit pouvait se détendre et évoluer librement à l’abri des éléments extérieurs. Il jeta un dernier regard sur l’horizon, les mèches rebelles de ses cheveux fouettaient son visage. 



Chaos Fear paparrazoted
ARnnO PlaneR
https://www.flickr.com/photos/67665515@N07/
Dans ses yeux se réfléchissait Aghendar qui s'étendait paresseusement le long d'un fleuve qui lui servit antérieurement de rempart. L'éclat miroirs des hautes façades resplendissait dans la nuit, telles des flammes silencieuses attisées par  les constellations d'étoiles des Mondes d'Aghendis. Des cascades de feux se déversaient sur les dômes de verre et accentuaient d'une couleur étrange les pupilles de ses yeux. Des  successions de pyramides cristallisées par les jeux de lumière s'entouraient de jardins suspendus ajoutant une impression de majesté à la cité. 


Golane posa un regard tendre sur sa ville, un regard émerveillé par un monde qui avait appartenu autrefois à ses ancêtres. Un temps où la mer de sable était alors un océan. Depuis peu, il ressentait une certaine appréhension, il avait atteint cet âge où les jeunes Grônes suivent leur première initiation de Maître et si les siens avaient encore été là, certainement qu’une grande cérémonie aurait été organisée pour son annonciation. Golane avait conscience d'être le dernier descendant des hommes d’Aghendis, le dernier d’une longue lignée de Maître Grône. Aghendis régit par le dictateur, Hony-Pry avait poursuivi et décimé son peuple. Derrière les murs transparents, il n'oubliait pas le prix du sang payé par les Maître Grônes pour le sauver de l'extinction finale. Il ne gardait en lui aucune haine, juste l'immensité de sa peine qui le submergeait en ce triste jour. Je suis le dernier murmura-t-il, le regard noyé dans les  bleus de sa cité. Les constellations d'Aghendis semblaient répondre à sa voix, sous des pluies d'étoiles, en resplendissant de mille feux. Golane percevait le chant des astres à travers les myriades d'étoiles, elles traversaient le temps en pulsions et enivraient son sang. 
Le silence qui occupait son esprit lui pesait bien plus que cette peine effrayante qui l'avait longtemps accompagnée. Il conservait ce besoin de partager ses pensées et luttait contre le poids de la solitude. Le souvenir de ses pères l'habitait et hantait chaque pierre des Terres de feu qui s'étendaient bien au-delà de toute imagination. Les mondes d'Aghendis traversaient le temps outrepassant les confins  de l'ultime barrière de l’envers univers. Les stations de ravitaillement, gigantesques et semblables à de grands îlots de métal voyageaient dans l’infini et scintillaient tels des joyaux posés sur le velours noir de l'espace. Elles peuplaient l'espace avec autant d'émigrants à son bord que d'étoiles parcouraient les univers connus. Golane pressentit qu’il lui faudrait un jour quitter sa cité et emporter avec lui le souvenir de ce monde avec son enfance. À cette pensée, une douleur presque cruelle persécuta son esprit. Dans ces moments, il lui semblait que l'univers embrassait tout son être d'une fièvre brûlante et propulsait son imagination loin des mondes connus à des vitesses que lui seule  pouvait percevoir. 


Little town-Paysage
Little town by Cica Ghoste
Lalie Sorbet SL
https://www.flickr.com/photos/87359584@N04/


Golane marcha en prenant soin de garder son équilibre, il suivit la paroi qui bordait le Spatio-Port sans se soucier du vide sous ses pieds, le glisseur accaparait encore toute son attention. Sa silhouette se dessinait sur les murs, sa carrure déjà très imposante trompait son âge, on le confondait parmi les hommes. Il ouvrit ses mains, des lignes inhabituelles en striaient les paumes et le trahissaient, il demeurerait aux yeux de ce monde, un Grône, un paria, un survivant parmi les Haguediens. 
Il protégeait le secret de ces lignes dans une prothèse de camouflage qu’il avait conçu personnellement. Il pensait à Dan Mars, son père adoptif qui partageait son secret et qui l’élevait tel son fils, fidèle à une promesse donnée à son père dix ans plus tôt. Golane protégeait dans son errance, tous ses souvenirs, quelque part entre des bleus et des rouges emplis de profonds secrets. Aghendar, pensa-t-il, en observant les lignes de ses paumes et le cœur triste...
Un jour, je reviendrais ! 


Valérie Naelle





Un petit mot de l'écrivaillon :

Vous venez de lire l'extrait d'un texte que j'ai divisé en quatre volets afin de l'alléger au mieux. J'ai une pensée tendre pour nos amis photographes et créateurs de Flickr qui ont donné leurs accords pour la participation de leurs photos et de leurs créations dans mes pages. 
Merci à Lalie Sorbet SL, ARnnO PlaneR et Pierre-André Gervaix.
Sans la magie de leurs talents, mes petites pages n'auraient de si jolies couleurs. C'est toujours avec une grande attention que je les suis très régulièrement sur Flickr.










Aghendar en quatre volets : 

1/2 La Cité Lumière
2/4 Vision d'absolue 
3/4 La Mer des Tranquillités
4/4 Les Chants du Pacifique




lundi 22 juin 2015

L'OMBRE DE LA LUNE




Lesud07




L’ombre de la lune


L'ombre de la lune
Vague sur ma joue
L'ombre de ton flanc
Effleure ma bouche
Délice de mes nuits
Tu es l'onde
Mille perles
Ô ivresse
Étanche  ma soif

L’Insolite traverse ma nuit
Tête couchée au pinacle
De mes sommets incurvés
Mains liées et corps enlacés
Gorgée d’opaques saveurs
Elle se blottit sans bruit
Sur mon sein et sur ma bouche
Usée de courir en mon jardin
Épuisée, elle s'endort radieuse

L’ombre galante
Trouble mon souffle
L’ombre de ta source
Je la devine pure
Divine eau
Elle se répand lumineuse
Fraîche  et secrète
À la dérobée
Sur mes lèvres

Boire à ta fontaine
Boire
En ton
Antre


Valérie Naelle



Lesud07







https://www.flickr.com/photos/lesud07/6828820565/in/faves-131200289@N07/

vendredi 12 juin 2015

MA BELLE EMBELLIE





Silence de N.H. Nouredine



Ma belle embellie


Abandonnée aux vagues
Ma pensée divague
Ma belle embellie surnage
Indécise sans lignage
Ma ferveur respire solitaire
Vide sans locataire
Mon étoile luit sage
Libre d'un souffle sauvage

Mes mots chutent telles des mouettes rieuses
Les ailes voltigeant sous des pressions joyeuses
Ma belle embellie, cette sirène sonne
Contre vents et marées, elle se donne
À cette houle qui lamine mes hauts-fonds
Mon cœur assassine tous sentiments profonds
Ces pulsions douées de fortes dépressions
Ont des vigueurs trop rudes sans initiations

Vos plages avaient un goût d’anis
L’abîme trouble d’un bel abysse
Où s’évaporaient des nuages mouvants
Dans le silence des brisants dérivants
Ma belle embellie avait vos yeux
Le tracé d’un horizon radieux
Immobile, les bras ouverts aux vents
Ingénue, je vous espérais en survivant

Ma raison se vide et tangue
Sur ma peau et sur ma langue
Ce goût de sel, c’est la vie hors lassitude
Juste quelques clapotis sans certitude
Où s'abattent des murs d’absolus
Le silence parle et me dit sans superflus
Toutes les couleurs rendent dérisoire
Les ondes amères non-potables à boire

Ma belle embellie, ma belle accalmie
Je scelle à vos lettres ma Belle Amie
La douceur tranquille d’une folle pensée
À ces coups de mer, j’ai résisté sans me froisser
Mon cœur vaincu a trouvé sur le lit du vent
Face à l’océan cette amène latitude en écrivant
Non plus à lui ! Je perds mon temps !
Pourtant, j’offre un dernier baisé à l’impénitent

Des choix d'une mauvaise de pioche
Ont eu raison de ma pétoche
Ma seule fortune en poche
Ma belle embellie mime Gavroche
À son fardeau, elle accroche
Une longue file de fantoches
Me direz-vous en riant telles ces roches
Que rien n’est fastoche ?

Ma belle embellie lutine libre
À contrepoids en équilibre
Telles ces mouettes rieuses
Elle s’est glissée sur les soyeuses
D’un miroir d’eau à Beaux Rivages
Leurs réflexions ont délesté des breuvages
Ces vagues à l’âme ont chaviré assurément
Pour un papillon, c’est vivre intensément

Passionnément !


Valérie Naelle



"Pour être dans une solitude absolue, il faut aimer d'un amour absolu"
Christian Bobin  





lundi 20 avril 2015

MUSE



Léda couchée au Cygne- Pierre Paul Rubens 


Muse


Ouvrir les yeux dans la lumière des brisants
Insuffler des frissons à votre oreille
Ma soif des hauts-fonds, mes désirs hurlants et cuisants
Pour quatre-heures décomptés emplies de merveilles

Nuit complice, les songes m'ont banni du silence
Où la noire quiétude de vos lèvres murmure le jour
Des mots soupirés qui se couvrent d'impatience
Je les sens sur ma peau, ils dansent, ils courent

De nos clairs après - midi, été comme hiver
J'ai conservé à mon palais vos saveurs de miel
Vos bras parapluies qui berçaient cette pubère
Prodiguant des leçons friponnes sous votre ciel

Sur mes pages, aucune tache blanche
Juste ma force pour vous écrire ma joie
Celle qui anime et inspire en avalanche
Ces galants versets où tout rougeoie

Je signe de mon souffle pour garder toujours
Mon ardeur qui demeure défendue à la tour
D'une clé gardée en mon cœur avec ferveur
Vous resterez à jamais cet impétueux trouveur

Le cygne qui se glissait fervent sur mon cœur


Valérie Naelle
 

lundi 6 avril 2015

ANGE



Sphinx regardant le rêve de Mnémosyne

Ilya Zomb


 Ange


Je suis un ange qui ne connaît pas la couleur
Mi-ombre, mi-lumière, je cherche mon archange
Je suis un ange qui ne connaît pas la chaleur
De ces arômes aux vapeurs étranges
En portion de rêves et sur mes lèvres
Ni goût d'anis, ni goût d'amertume
Juste ces douloureuses fièvres
Qui me laissent en croix sur le bitume

Je suis un ange qui ne connaît pas de liqueurs
Ni élixirs, ni absinthes et sèves
Je suis une bohémienne qui récite à contrecœur
Des vers et bois à des songes sans trêves
Dans ce calice ni émeraudes, ni parures dorées
Juste la force de mes souffles aspirés
En goutte-à-goutte en ondes évaporées
Par deux traits brossés sur des toiles déchirées

Je suis un ange grisé, ivre de désir
Dans ces jardins aux douceurs intemporelles
J'entrevois cet autel de tous les plaisirs
À son fronton, toutes les pièces incorporelles
Sont comme enlisées sur des rives d'infortune
Laissez-moi me perdre à ces douceurs oisives
Doucement m'étendre sur les lagunes
De ces étreintes brûlantes exclusives

Je suis un ange
Qui ne connaît que la brûlure
De cette piqûre qui m'éloigne de vous et m'en prive
Dépendance, je souffre à cette fêlure
Qui vide mes artères et me pousse à la dérive
Opalescence
Je suis un ange qui aime vos blancs sans rougeur
Quintessence
Je suis un ange qui ne connaît pas les effets ravageurs
D'un archange


Valérie Naelle
 




PLACE DE CHÂTELET




Ragespinloss




Place de Châtelet


Il pleure sur mon cœur
Je t'ai attendu des heures
À l'ombre de la Victoire ailée
Sous le tracé de mon plumier
La fontaine aux Palmiers
Prends des airs de corps de ballet
Quatre Sphinx patientent muets
La Seine tangue et berce
Mon cœur brisé par l'averse
De ces carences serties de vermeils
Le bras ballant de lampes en sommeil
Au Pont au Change
Mes lignes flânent et vendangent
Des pluies qui crèvent mes feuillets
Où le temps assassine nos menuets

Place de Châtelet
Mon âme a perdu son roitelet
Je t'ai attendu au centre du monde
Espérant retrouver ta douce onde
Mais ce n'était qu'un rêve
Où les cafés renvoient sans trêve
Ces éclats sans lumière où je me perds
Sans ta voix, sans repères
L'horloge de la Tour tourne sourde
Des lettres tristes et lourdes
Mon silence se fait prière
Les rues se voilent de lumières
Sous le regard des passants
Indifférence, agitation, fracas harassant
Un vieux chien sort de la foule
Pour sitôt disparaître dans la houle

Tourner la page à ce mirage
Outrepasser droit dans le virage
Brûler ma part de mystère
Aux douces vapeurs d'éther
Nulle tristesse, nulle peine
Sceller mes émotions, et même ma haine
Murer ma chair omise en mirador
À des vertiges de corps-à-corps
Enfouir en tombeau ma jeunesse
Condamner ma part de tendresse
Aux liqueurs grisantes
Ne retenir que ces raisons agonisantes

Place de Châtelet, il pleure sur mon cœur
La Seine a chanté ses reflets en chœur
La fontaine aux Palmiers à des airs de ballet
Je n'attends plus tes heures sur l'Îlet
L'horloge a sonné


Valérie Naelle

Pascal




jeudi 19 mars 2015

AU PASSÉ DES SAISONS








Pour passer les saisons 


Pour passer les saisons
Sans guetter les flocons 
Je suis vers Avignon 
Non dans mienne maison

Vous avez des raisons
De fuir loin en cocon
Je trouve trop mignon
Nos deux combinaisons

Le chemin est long
Il y en a qui le font
Moins en avançant, qu'à reculons
Cela me met hors des gonds !
Mais vous, papillon 
Comme dans un dessin de Folon
Vous errez, parfois à tâtons
Entre insouciance et abandon
Vivre est un sacré don !

Pardonnez ma candeur
Je ne suis qu’une enfant
Les yeux un peu trop grands
Mais mon cœur est profond
Messire si par pudeur
Je crains le jeu bouffant
Des tulles et c’est flagrant
Pour vous, je suis typhon
Vivre sans vous !

C'est dindon !


Valérie Naelle
Le Scribe

dimanche 1 février 2015

La fin du jour, la soirée arrive






La nuit tombe


À nouveau, tu vas me manquer
Je ne serai pas à ton banquet
Tu ne me verras pas sur ta rive

D'un froissement d'aile qui coupe l'air
Une pluie d'hirondelles traverse le ciel
Cisaille en menus feuillets mon cœur
Recouvre ma peau de blessures fermées
La fin du jour, la soirée arrive
Les libellules dansent sur l'eau
Elles partagent cet océan de rivière
Aux éphémères sorcières de laines
Les fées ont délaissé leurs robes
De fines dentelles et de brumes laiteuses
Leurs longues traînes filandreuses glissent sur l'eau
Recouvrant les bouquets de feuilles mortes

La fin du jour, la soirée arrive
Les derniers rayons de lumière émiettent mon cœur
Le jour et la nuit se croisent en deux mondes étranges
Vivre l'un sans l'autre
Une souffrance sans cesse redessinée en multiples traits 

La nuit tombe en creusant le silence aux étoiles
Le ciel scintille sous la coupe opalescente d'une lune
Troublée par le passage éphémère des nuages
Qui se disloquent à l'appel du vent
La fin du jour, la soirée arrive
Avec la nuit me parviennent ces peines amères
Des lames brûlantes d'épreuves et tant de questions
Qui ne trouvent de réponses que dans les remous
D'une eau qui chaque jour change son courant
Sa couleur est si sombre, elle cache trop de secrets
Qui naissent et s'oublient au gré des saisons
Dans un temps suspendu au fil de l'eau

La fin du jour, la soirée arrive
Comment mon souffle arriverait-il à passer dans le monde
Sans désirer vos baisers et vos terres si belles
Sans en conserver les contours à me perdre sur vos dunes

Se pourrait-il que les parfums les plus doux
Soient emprisonnés dans ces deux flacons de verre
De ces yeux où je découvre tant de peine
De ces mains posées l'une sur l'autre
La fin du jour, la soirée arrive
Les mots ont leurs silences et des plus singuliers
Des notes sourdes qui n'ont plus de raisons
Si peu en ce monde cherchent à les écouter
Votre chanson est arrivée à percer mon cœur
Elle me mande de garder cet amour pérenne
S'il est sublimé, c'est parce qu'il l'est
Avec son histoire en calice orné de grandes espérances

La fin du jour, la soirée arrive
Un manteau de velours noir recouvre la terre
La nuit saisit le jour, il en est ainsi depuis la nuit des temps
Telle est la fortune de ceux qui aiment et n'ont de richesses

Ils offrirent leurs cœurs en offrande aux berceaux étoilés
Leurs lèvres dessinèrent des chemins sous des pluies naissantes
Traçant sur ces voies la brûlure qu'engendre deux veines unies
Par le cœur et par l'esprit
La fin du jour, la soirée arrive
Les astres fixent émus cette femme au buste serti de satin blanc
Qui pose sur les genoux d'un amant, sa tête, découvrant une nuque
Où se lit que tous les courants retrouvent toujours le lit de l'océan
Ni jour, ni, nuit
Juste une chanson qui fait vœux et serments à lier deux âmes
Deux paroles offertes au temps

Valérie Naelle
Le Scribe






dimanche 4 janvier 2015

Les Encres Amères






 En fait


Peu m'importe si tu liras ces mots un jour
Ce soir
J'ai besoin de les aligner sur ces feuilles
En espérant qu'avec elles s'envolera mon ardeur
Où l'encre amère de tes mots ne se glisserait plus
À chacune de tes lettres me renvoyant à mes désirs
Où la raison s'imposerait par solitude
Dans une impulsion légère, irrésolue


J'écris
Je me suis laissé prendre malgré moi
À ce jeu trop cruel
Auquel j'avais juré que l'on ne me prendrait plus
J'étais certaine que tu aimais notre histoire d'amour
Celle que tu modelais dans tes carnets
Bien plus que moi
Que je me nourrissais en vain de nos espoirs
Dans ces attentes interminables


Quelle Belle utopie !
Moi qui voulais échapper à cette possession
Ma Grande espérance !
Trouver un démenti à cette terrible certitude
Dans ce duel où nos couplets se croisaient
J'ai relu ce soir ta dernière lettre
Tes mots sont si chauds
Si présent encore
Qu'ils m'ont fait oublier un instant
Le froid de ce silence


Que tu m'écrives
En bel enfant sans verbe à livrer tes émotions
Je t'aime, énormément
C'était il y a trop longtemps et depuis il y a ce vide
À quoi bon, je n'attends plus tes mots
J'ai la consolation de tes lettres et me faut-il admettre
Qu'ils aient été pour moi, ces je t'aime si beaux
Ces puissants accords
Au temps qui passe et creuse ton absence
J'ai soudain envie de dire mes tourments
Murer définitivement les portes de mon cœur
Pour me convaincre que tu m'oubliais placide
Que je ne t'aimais plus, mais c'était là comme parier
Sur un jeu faussé d'avance


Mon cœur hurlait au feu du crépuscule
J'oublie !
L'écho en mon cœur me répondait
Jamais !
De mes yeux ont coulé souvent des
Reviens !
Si mes mots ont voulu te chasser de ma mémoire
J'imagine mes encres trop amères
Où je reste malgré moi le funambule
De mes propres mots où je te supplie
De rester encore en mon palais


Désormais
S'éparpilleront sur la douceur de mes pages
Ces morceaux de moi déposés en exil
Mes lettres luttant contre mes peurs, mes doutes
L'insupportable pesanteur de mon corps
Qui écrase mes pensées les plus légères
Où je saisis au bras de l'évidence
Oui, en t'écrivant ce soir
Je n'ai plus qu'à contempler dans ce combat
Ce cruel duel à l'écho de mon cœur
Le résultat de cette amère bataille
L'amertume de mes mots
Mon ultime défaite où je croyais te maudire
Et pensais bien ne plus t'aimer puis mourir
Pourtant


Ces mots demeureront gardiens de mes secrets
Où mon cœur conservera en palissade d'écume
Cette brûlure silencieuse, le mystère de ces encres amères



Valérie Naelle