"On est de son enfance, comme on est d'un pays"

Antoine de Saint-Exupéry

samedi 18 février 2017

SERMENTS



Silence II
Larry Nienkark


Serments


Me pardonneras-tu ce silence
Ma lenteur, mon hésitation à cette alliance
Quand liras-tu ce message
Mon cœur t'envoie cet appel en sillage
L'intensité de mes forces décuplées
Sur nos soupirs accouplés

Comment te portes-tu à ce manque enduré
Ne m'as-tu oublié dans la durée
Te souviens-tu toujours de ce rivage
Où j'ai rêvé de te sentir moins sage
Lors qu’à nos pieds se retirait la mer
Te souviens-tu de cet été doux-amer

Où tes yeux m'ont rendu fragiles
M'ont fait aimer mes chaînes en esclave docile
Où j'ai découvert que nous étions une paire
Mon âme reste comme scellée à ta chair
Je retrouve tes yeux sur tous mes paysages
Je ne peux de moi écarter ton image

Mes notes ont gardé les accords mineurs
Que je jouais pour te tirer des larmes
Je venais alors d'un souffle les sécher
Avant de déposer sur tes lèvres un baiser
Me pardonneras-tu d'avoir déposé mes armes
Donné raison à des arguments sans teneur
Posé mon étoile sur des rivages inapaisés
T'aimer aura été ma seule faiblesse cachée

À mon cœur amoureux pardonne de ne plus t'écrire
Car il ne sait les mots assez beaux pour te dire
Combien ton souvenir lui cause de délires
Mon désir voudrait faire rimer toujours
Avec l'éternité de nos serments d'amour


Valérie Naelle





dimanche 12 février 2017

Mirabilis Jalapa, Belle-de-Nuit







Belle-de-Nuit


Vous étiez l'élu de mon cœur
Vous étiez ma douceur, vous étiez ma douleur
Un dictateur, un séducteur
Mon bourreau, mon crève-cœur
Un amour consacré, unit d'ardeur, de pudeur
Dont vous étiez l'étrange ambassadeur

Je vivais en marge de vos rives
Tel un poisson cherchant à la dérive
Respirer vos étés, vos eaux vives
Dans ces contrées dont je n'étais native
Vous veniez à moi, la petite oisive
Voler un baiser tendre dans la coursive

Je buvais vos jours, je buvais vos nuits
Des secrets murmurés juste après minuit
Je rêvais nos accords, j'étais votre fruit
Dans vos bras, votre Belle-de-nuit
Une fleur sur votre torse que votre cœur séduit
Dans vos yeux, je devinais l'enfance qui fuit

Aussi loin que mes pensées s'en souviennent
J'ai gardé l'empreinte de vos mains dans les miennes
Lors, je lisais nos lignes de vie, j'étais une Bohémienne
Qui se faisais à vos regards une insolite magicienne
Espérant qu'un jour cet amour me revienne
Afin que nos toujours et à jamais nous retiennent

Je vous aimais bien plus que moi-même
Et vous aurais offert mon corps en baptême
Donné tout mon sang à en être blême
Lors, je dépose aux racines de mon amour ce poème
Mes feuilles tressées de laurier de feu  en diadème


Valérie Naelle






Photo: https://www.flickr.com/photos/capsul/3574947044/in/faves-131200289@N07/

lundi 6 février 2017

Fleur de Lotus, le message du Scribe Kahai





SOLOEGIPTO


Fleur de Lotus 
De Kahai à Meretites


Dans la quiétude des pierres
Mon chant est un paisible voyage
Un reflet de lumière qui danse
À la lisière de tes cils
Un soupir dont la résonance
A parcouru dix mille ans
D'une longue traversée sur l’infini
Ma Sœur, Ma Belle Immortelle
Mon amour s’écoule en renaissance
Sur les rivages fertiles du Nil

J’esquisserai de mon calame
Le galbe de ton visage
Je tracerai pour l’éternité
Toutes les couleurs de la vie
Mon ultime parole en héritage
À la courbe de tes paupières
J’irai où mes pas me nomment
Sur l’empreinte de tes lettres
De mes mots, je concevrai des clés
Pour ouvrir les Portes de la Création

Mon poing frappera doucement
Sur la céleste fenêtre du temps
Pour couvrir ton cœur de lumière
Je me ferai Refuge de nos âmes Sacrées
Ma main s’ouvrira en une paume
Pour bercer doucement ton corps
Je déposerai à l’aurore de tes lèvres
Les bleues lazurites de mon âme
Toutes mes pensées en averse
Pour un dernier souffle de paix

Il y a un nuage dans notre ciel
Qui se souvient que tu as été mienne
Car dans mon âme coule une larme
Peau contre peau
Je défendrai des orages de sable
Tes tourments et tes silences
L’antre de ton ventre
Qui me fait perdre la raison
J’accrocherai à la voûte de ton ciel
Des bois d’ébène perlés de cornalines

Les Seigneurs du Temps
Les Grands-Maître Pharaons
Ont versé leurs puissances
Dans les eaux du Nil
En espérance aux pluies éternelles
Mais le sable a pérennisé son passage
Sur notre  Mère-Terre en postérité
Vois comme les astres se sont égarés
Sous le berceau d’un monde
Où le Sang demeure en peine

À ces notes figées et immobiles
Dans la mouvance du temps
Sur la pierre où ma pensée
S’élève cosmique
Je dépose toutes mes forces
Mon écriture où transcrit ma ferveur
Un murmure au plus profond de mon être
Qui te dis à tort et à travers
Des mots dont la magie n’a d’éclat
Qu’à la stèle de tes yeux

Ma Sœur, Ma Femme
Ma Belle Immortelle
Aucune histoire n’est plus belle
Lorsqu'elle ne trouve jamais de fin
Si près de moi, ma fleur
Tu peux me dire enfin
« Reviens »
« Rentrons »



Valérie Naelle








Photo de Soloegipto : https://www.flickr.com/search/?sort=relevance&text=soloegipto&advanced=1

Dans le jardin des éphémères, de Meretites à Kahai





Dans le jardin des éphémères
De Meretites à Kahai



Dans le jardin aux oiseaux
J'ai délayé mes encres
Taillé mes rêves au biseau
Jeté à l'infini nos ancres
Je suis un papillon de nuit
Le chant grisé de pluie
La soie plissée d'aurore
La silhouette baignée d'or

Fille d’Isis et d'Anubis
D'une ébauche de khôl, j'esquisse
À la stèle de nos yeux, la lumière
Puisse mon feu éterniser ma prière
Afin que mon cœur ne cesse de battre
À jamais pour un amour ciselé d'albâtre
Figée dans l'ambre de ta chaleur
D'une main, j'atténue ta douleur

Nos deux lettres pérennes
Ont franchi le temps qu'égrènent
Quatre mille ans
De regards bienveillants
Nos cœurs sont à jamais couronnés
De ces doux sentiments rayonnés
Je garde nos baisers au secret
D’un serment d'amour sacré par Rê

D'un long sommeil, je renais chenille
De mes songes, j'éparpille
Des astres brisés d'écueils
Où je grave ton nom à mes recueils
Au lit de mon tombeau
Ni calice, ni flambeau
Juste l'intensité de nos mémoires
Qui me laissent au silence choir

Chrysalide, je me réveille, je mute
À ton chant, je crapahute
Je me découpe nu-pied
Des ailes d'or et de papier
Pour toi ! Kahai !
Dans le jardin des éphémères
Mes mots se font étoiles et mers
À mon âme vagabonde l’étincelle
De nos regards que l'éternité scelle


Valérie Naelle




Theleme95






http://www.livescience.com/41237-love-revealed-in-egypt-tomb.html
Credit: Photo by Ms. Effy Alexakis, copyright Macquarie University Ancient Cultures Research Centre

samedi 4 février 2017

La Boréale





www.flickr.com/delaville





Une saison d'hiver



Au royaume des oubliés
Nul n'a de visage
Sous la houle montante 
Des marées humaines
Surgit de l'asphalte déshabillé
La ville aux rumeurs qui voyage
Sur la brise évanescente
Mon souffle oscille en ce domaine



Le Grand Boulevard se prélasse
Sillonné d’artères tracées à l’eau-forte
À la lisière d'un horizon fossilisé
Étincellent  les mosaïques de verre
Aucun jour, aucune nuit ne passe
Sans le trouble de mes pensées mortes
Le soir chante sous mes godasses épuisées
La Victoire dépouillée du Square d'Anvers


Lorsque s'enlumine dans la lumière
Des Passages des Panoramas 
Le ciel couvert des murmures d'antan
Au fond de mes poches fredonne
La valse vaporeuse des bouquinières
Le Caffé  Stern fait son cinéma
Deux portes farandolent à contre-temps
La galante Vénétie qui chantonne


Le cœur des terrasses chahutent 
Les chaises s'agitent et s'entrechoquent
Les passants se pressent où paressent
À l'ombre d'une époque passée
Des pas oppressés par les minutes
Lèchent les vitrines de breloques
L’éclat d’un palais d’ivresse
Suspend la marche des empressés


Dans l’extase dénudée des toiles 
Un vide nourrit d’obscurs mirages
Des rêves où le papier glacé chemine
Depuis les parvis de béton et de métal
Au cœur d’une nuit sans étoiles
J'imagine dans cet étrange voyage
Des mots pour taire ma famine
Cette briseuse de fonction vitale


La Seine alanguie d'un sommeil boréal
S'abandonne pour un air de blues
Des triades de notes batifolent
 À la barbe des gargouilles
Ma ville se pare d'un doux vermeil nuptial
Et s’éveille telle une belle andalouse
Au petit matin si ma bohème s'envole
Mes poches rentrent bredouille



Valérie Naelle