Au royaume des oubliés
Nul n'a de visage
Sous la houle montante
Des marées humaines
Surgit de l'asphalte déshabillé
La ville aux rumeurs qui voyage
Sur la brise évanescente
Mon souffle oscille en ce domaine
Le Grand Boulevard se prélasse
Sillonné d’artères tracées à
l’eau-forte
À la lisière d'un horizon fossilisé
Étincellent les mosaïques de verre
Aucun jour, aucune nuit ne passe
Sans le trouble de mes pensées mortes
Le soir chante sous mes godasses
épuisées
La Victoire dépouillée du Square
d'Anvers
Lorsque s'enlumine dans la lumière
Des Passages des Panoramas
Le ciel couvert des murmures d'antan
Au fond de mes poches fredonne
La valse vaporeuse des bouquinières
Le Caffé Stern fait son cinéma
Deux portes farandolent à contre-temps
La galante Vénétie qui chantonne
Le cœur des terrasses chahutent
Les chaises s'agitent et
s'entrechoquent
Les passants se pressent où paressent
À l'ombre d'une époque passée
Des pas oppressés par les
minutes
Lèchent les vitrines de breloques
L’éclat d’un palais d’ivresse
Suspend la marche des empressés
Dans l’extase dénudée des toiles
Un vide nourrit d’obscurs mirages
Des rêves où le papier glacé chemine
Depuis les parvis de béton et de
métal
Au cœur d’une nuit sans étoiles
J'imagine dans cet étrange voyage
Des mots pour taire ma famine
Cette briseuse de fonction vitale
La Seine alanguie d'un sommeil boréal
S'abandonne pour un air de blues
Des triades de notes batifolent
À la barbe des gargouilles
Ma ville se pare d'un doux vermeil nuptial
Et s’éveille telle une belle
andalouse
Au petit matin si ma bohème s'envole
Mes poches rentrent bredouille
Valérie Naelle
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